Lorsque l'opéra-comique apparaît au début du xviiie siècle, il est apparenté à la farce et à la comédie. Cependant, les travaux consacrés à l'étude du genre soulignent l'ambiguïté du terme « comique » : en effet, si le caractère comique semble initialement constituer un trait définitoire, l'évolution de la forme suggère bientôt une redéfinition voire une éviction du rire. Cet ouvrage a pour objectif de reconsidérer la dimension comique du genre aux xviiie et xixe siècles, examinant tant l'apport de compositeurs comme Auber, Bizet, Duni, Grétry et Ildefonse Luce, que l'enracinement de l'opéra-comique dans le vaudeville et la parodie, ou encore l'évolution des conventions à l'époque d'Offenbach et de Delibes. Entre musicologie, littérature et arts du spectacle, l'ouvrage rend compte de la variété de l'expression comique, qu'il s'agisse d'oeuvres fondatrices ou de manifestations plus originales, des procédés suscitant le rire et le sourire, de l'interprétation et du jeu sur la scène, des échanges avec d'autres scènes/formes, ou des questions théoriques soulevées - de la censure aux usages de l'institution. Ces approches croisées interrogent en filigrane la définition même de l'opéra-comique, et incitent à mettre l'accent sur des principes clés du genre, comme la notion d'emploi. Il en émerge un panorama assez nouveau qui invite à revaloriser le comique comme une composante essentielle du genre.
Depuis un bon siècle et demi, le nom d'Eugène Scribe, inventeur du vaudeville moderne, dramaturge le plus populaire d'Europe un siècle durant et librettiste le plus respecté de son époque, est devenu pour les élites synonyme de médiocrité académique et bourgeoise. De nos jours, il n'est connu que des amateurs d'opéra. Pour ceux-là, il n'est guère plus qu'une signature au bas d'oeuvres rarement exécutées (Les Huguenots, La Juive, Robert le Diable, Fra Diavolo...) Or, la principale cohérence de ces oeuvres réside dans leurs représentations des rapports sociaux de sexe. Cela est vrai des grands opéras qui, systématiquement, mettent en scène pour les dénoncer des fanatismes masculins (politico-religieux, comme dans La Juive, Les Huguenots ou Le Prophète, impérialistes comme dans L'Africaine, ou simplement phallocentriques et homo-sociaux, comme dans Robert le Diable), fanatismes dont les femmes sont systématiquement les victimes. Ceci est encore plus vrai, peut-être, des opéras-comiques que l'on joue encore parfois (Le Comte Ory, Fra Diavolo, Le Cheval de bronze ou Les Diamants de la couronne, où l'on rencontre un authentique féminisme à une époque où celui-ci en est encore à ses balbutiements en France).
Grâce à des éléments relevés dans la biographie due à Jean-Claude Yon, je crois entrevoir d'ores et déjà les origines personnelles et psychologiques de la gynolâtrie - cette sorte de proto-féminisme - dont Scribe fait preuve dans ses livrets, et qui va de pair avec une critique étonnamment systématique des travers de la masculinité (fanatisme, donjuanisme, violence, égoïsme, sur-idéalisation des femmes et de l'amour passion, jalousie, etc.) C'est donc par l'examen de douze livrets d'opéras et d'opéras-comiques, et ce à travers le prisme des rapports sociaux de sexe, si peu pratiqué encore de nos jours en France, que j'entends réhabiliter cet auteur si mal-aimé.
Par la richesse de ses sources et de ses citations, par la multiplicité des définitions de termes et d'exemples d'analyses, par son organisation thématique, cet ouvrage est indispensable tant aux historiens et théoriciens du cinéma qu'aux musicologues, compositeurs et cinéphiles.
Par leur longévité - plus de quarante ans -, par le nombre des concerts - entre un et trois par semaine en moyenne -, par le faste des moyens humains et financiers et par la diversité des lieux qui les accueillirent (Versailles, Marly, Fontainebleau, Compiègne.), les concerts de la reine Marie Leszczynska furent incontestablement l'une des plus importantes structures permanentes de concerts de l'Europe du xviiie siècle.
Inscrits dans la continuité des concerts d'appartement institués sous le règne de Louis XIV, les concerts de la Reine programmèrent essentiellement des actes d'opéra exécutés indépendamment de la scène lyrique. Si le choix de mettre une oeuvre au programme des concerts de la Reine peut s'interpréter comme une démarche d'ordre artistique ou esthétique mettant en mouvement des acteurs multiples et conduisant à promouvoir un goût musical spécifique, on ne doit cependant jamais perdre de vue qu'il s'agissait d'abord d'un acte dont la portée était clairement d'ordre symbolique et politique. En ce sens, ces manifestations constituèrent un creuset totalement singulier dans le monde du concert au siècle des Lumières, creuset où l'affirmation d'une tradition nationale se conjugua avec l'émergence du concept nouveau de musique classique.
Maurice Denis (1870-1943), l'un des peintres français les plus connus de son temps, n'a cessé, de la période nabi jusqu'à la fin de sa vie, de contribuer, par la plume et le pinceau, à l'évolution de l'art. ?Très apprécié des musiciens, l'auteur d'une Histoire de la musique (frise ornant la salle du Théâtre des Champs-Élysées à Paris), et de L'Amour et la vie d'une femme d'après le cycle de Robert Schumann, se passionne très jeune pour la musique, se liant d'amitié avec de talentueux interprètes et compositeurs, devenus célèbres ou tombés dans l'oubli. Sa correspondance révèle la richesse des relations du peintre avec la société musicale à laquelle il prendra une part très active sa vie durant.?L'oeuvre et la pensée de Maurice Denis, mises en parallèle avec son goût musical, sont confrontées à l'oeuvre et à l'esthétique des musiciens qu'il côtoie. L'étude, fondée sur les écrits du peintre et des témoignages souvent inédits, est agrémentée de photographies et de nombreuses reproductions de ses oeuvres. Elle est l'occasion, pour les mélomanes et amateurs d'art, d'une nouvelle appréhension de la musique sous la Troisième République, au travers des lieux fréquentés par Maurice Denis, de ses amitiés et de ses collaborations. Elle apporte également un éclairage nouveau sur les correspondances entre les arts à une époque où les peintres aimaient s'inspirer de l'oeuvre des musiciens, et inversement. L'ouvrage permet enfin de découvrir un peintre qui, à l'instar de Verlaine, recherchait " de la musique avant toute chose ".
Outre l'étude d'oeuvres emblématiques comme Biondina de Charles Gounod, les Ariettes oubliées de Debussy ou la mise en musique de Recueillement de Charles Beaudelaire par Claude Debussy, Louis Vierne et Jean-Yves Malmasson et de corpus plus rares les mélodies de Gustave Charpentier et de Georges Enesco, ou encore les mélodies composées sur des poèmes de René Chalupt, cet ouvrage propose un éclairage nouveau sur la vie musicale lyonnaise de la Belle Époque à travers les archives du critique Émile Baux et l'étude des compositions pour voix et piano d'Ennemond Trillat.
On s'occupe rarement des chanteurs d'une façon un peu instructive, et on ne le fait point de manière à ce que l'étude de leur talent soit profitable. On encense les favoris du jour, on les couvre de louanges hyperboliques, sans leur faire l'honneur d'une discussion sincère. Quant à ceux du passé, on se répand sur leur compte en anecdotes plus ou moins authentiques, on en fait de véritables idoles qu'il ne reste plus qu'à diviniser ; mais on ne les discute pas davantage, et l'on ne se donne même pas la peine de rechercher l'ensemble des qualités qui constituaient le fond de leur talent.
Quelques types de chanteurs se sont présentés à moi, des plus originaux et des plus sympathiques à la fois parmi ceux qui ont brillé jadis sur notre seconde scène lyrique ; je me suis pris à les étudier, à les aimer, et ce que je veux faire, c'est rapporter simplement ce que des recherches, parfois laborieuses, m'ont appris à leur sujet. Et comme en eux le caractère est aussi curieux que le talent, je tâcherai, en faisant connaître de mon mieux l'artiste, d'esquisser la physionomie vive et accentuée de l'individu.
Un cauchemar musical est une de ces réalités inqualifiables qu'on exècre, qu'on méprise, qui vous obsèdent, vous irritent, vous donnent une douleur d'estomac comparable à celle d'une indigestion, une de ces ?uvres chargées d'une sorte de contagion cholérique qui se glissent on ne sait comment, malgré tous les cordons sanitaires, au milieu de ce que la musique a de plus noble et de plus beau, et qu'on subit cependant en faisant une horrible grimace, et qu'on ne siffle pas, tantôt parce qu'elles sont faites avec une sorte de talent médiocre et commun, tantôt à cause de l'auteur qui est un brave homme à qui l'on ne voudrait pas causer de peine, ou bien parce que cela se rattache à un ordre d'idées cher à un ami, ou bien encore parce que cela intéresse quelque imbécile qui a eu la vanité de se poser votre ennemi, et que vous ne voudriez pas, en le traitant selon son mérite, avoir l'air de vous occuper de lui.
Des simples billets de Berlioz, Bizet, Wagner aux correspondances fournies de Gounod (affectueuse), Liszt (aux conseils avisés) ou Widor (amusée ou mordante), de la lettre torrentueuse de Stamaty en 1846 proposant un programme d'études pour le jeune Saint-Saëns à celle, argumentée, de d'Indy en 1919, défendant ses convictions musicales, ce sont plusieurs générations de créateurs notoires, à des titres divers, qui sont représentées par près de six cents documents tirés des archives personnelles de Camille Saint-Saëns (1835-1921), accumulées au cours d'une étonnante carrière de soixante-quinze ans comme pianiste, organiste et compositeur à la réputation internationale.
Être ou ne pas être, voilà la question. Une âme courageuse doit-elle supporter les méchants opéras, les concerts ridicules, les virtuoses médiocres, les compositeurs enragés, ou s'armer contre ce torrent de maux, et, en le combattant, y mettre un terme ? Mourir, - dormir, - rien de plus. Et dire que par ce sommeil nous mettons fin aux déchirements de l'oreille, aux souffrances du coeur et de la raison, aux mille douleurs imposées par l'exercice de la critique à notre intelligence et à nos sens ! - C'est là un résultat qu'on doit appeler de tous ses voeux. - Mourir, - dormir, - dormir, - avoir le cauchemar peut-être. - Oui, voilà le point embarrassant. Savons-nous quelles tortures nous éprouverons en songe, dans ce sommeil de la mort, après que nous aurons déposé le lourd fardeau de l'existence, quelles folles théories nous aurons à examiner, quelles partitions discordantes à entendre, quels imbéciles à louer, quels outrages nous verrons infliger aux chefs-d'oeuvre, quelles extravagances seront prônées, quels moulins à vent pris pour des colosses ?
Fondée en 1890 par des musiciens du Grand-Théâtre et par une poignée de notables montpelliérains amateurs de musique, la Société des concerts symphoniques de Montpellier propose chaque année six à huit manifestations dans la salle de concerts du théâtre. De 1890 à 1903, elle en organise soixante-dix-neuf dont la programmation exemplaire laisse deviner une activité artistique ambitieuse à la hauteur des aspirations de la cité languedocienne, période durant laquelle celle-ci fête le sixième centenaire de l'Université, fonde l'hôpital Saint-Éloi et redonne vie à son GrandThéâtre (incendié en 1882 et reconstruit en 1888). La Société profite de sa proximité avec l'orchestre du Grand-Théâtre dirigé par Armand Granier, premier président de la S.C.S.M., et avec l'École de musique, située au premier étage du même bâtiment.
Son activité étend le réseau des sociétés de concert fondées depuis le Second Empire à Toulouse, Bordeaux, Marseille, Lyon, Lille, Rennes ou Angers, dont l'objectif est de diffuser la musique classique auprès des masses, suivant le modèle parisien initié par Jules Pasdeloup. Organisée selon le principe de la souscription et pratiquant une tarification modeste, la S.C.S.M. cherche son identité entre concert populaire d'une part et concert semi-public fondé et soutenu par une élite fortunée, sans recourir à la subvention, d'autre part.
Sa dissolution en 1903 coïncide avec la crise de l'industrie viticole régionale et met momentanément fin à une activité symphonique du plus haut niveau, faisant de la S.C.S.M. l'ancêtre, tardif mais parmi les plus remarquables, de l'Orchestre de Montpellier fondé en 1979.
Cristóbal de Morales, « Lumière de l'Espagne en musique », est sans doute l'un des compositeurs les plus fascinants de la Renaissance. Auteur d'une oeuvre saisissante par sa densité et sa subtilité, bien que relativement peu abondante, sa musique continue encore à captiver les auditeurs d'aujourd'hui.
Cet ouvrage vient combler le grand vide qui jusqu'à présent régnait sur l'une des périodes créatrices les moins connues du compositeur : celle qui a précédé son séjour romain, que l'on devine, grâce aux oeuvres du manuscrit de Valladolid, beaucoup plus riche et féconde que ce que nous imaginions auparavant.
L'auteur tente de relever les défis de cette personnalité complexe et de décrypter à la fois ses premières données biographiques et les controverses dont il a été l'objet au fil des siècles, et offre au lecteur des transcriptions et analyses des musiques de sa toute première période, dont un motet et un magnificat inédits à ce jour.
Trois partitions à l'usage des choeurs seront publiées simultanément.
La Révolution française favorise rêves et ambitions chez les femmes et la transition entre Ancien Régime et nouveau contexte politique leur donne l'opportunité de se redéfinir. Femmes de théâtre et femmes de lettres embrassent les principes égalitaires et libertaires de la Révolution avec enthousiasme et accèdent au domaine de l'opéra, monde alors dominé par les hommes, exposé aux intrigues politiques et aux querelles esthétiques. Malgré ces obstacles, les opéras des femmes sont parmi les plus joués à Paris. Cette présence affirme donc leur droit à une carrière publique et à l'expression artistique, bien qu'elles soient perçues comme une menace et rebelles à leur condition. Ce phénomène, dont la période s'étend de 1770 à 1820 environ, restera inégalé en Europe et pour les siècles suivants. À partir des années 1820, la défaite des femmes sera d'autant plus poignante qu'elles étaient convaincues que leurs succès trouveraient confirmation dans la génération suivante.
Cet ouvrage s'intéresse aux phénomènes qui ont rendu possible cette floraison d'opéras de femmes. La première partie se concentre sur celles qui ont réussi à faire représenter leurs opéras sur scène : elle donne un aperçu des auteures et de leurs oeuvres, expose les moyens par lesquels les femmes ont pu acquérir leur éducation musicale, présente les obstacles institutionnels qu'elles ont dû surmonter pour voir leurs opéras produits sur les théâtres parisiens et traite des problèmes associés à l'affirmation de leur autorité et de la paternité sur leurs oeuvres. La deuxième partie est une étude détaillée du cas d'Isabelle de Charrière, témoin du succès de ses collègues féminines dont elle partagea les ambitions, mais qui ne réussit pas à surmonter les obstacles qui se sont dressés sur son parcours malgré ses efforts.
Ce livre révèle comment Olivier Messiaen, l'un des phares du xxe siècle musical, a bâti son oeuvre singulière en transformant les musiques qu'il aimait. Au long d'une enquête vaste et minutieuse, qui associe une relecture complète de ses écrits théoriques à l'analyse de ses partitions, les auteurs démontrent que Messiaen s'est forgé une technique d'emprunt, véritable méthode de composition irriguant toute sa production. L'origine d'une part majeure de son matériau musical se trouve dans un corpus large et éclectique : des courbes mélodiques de Mozart et Rameau aux rythmes irrationnels de Debussy ou Jolivet, des cantilènes hindoues aux harmonies sophistiquées de Ravel, Tournemire, Berg ou Massenet, des antiennes du plain-chant grégorien à de « charmants spécimens » de chansons populaires.
Comprendre la matrice intellectuelle de cette technique, étudier les mécanismes de la collecte d'emprunts et de la fabrication de formules, saisir l'interaction de ces matériaux et leur montage dans les oeuvres offre une nouvelle clé de déchiffrement de la musique de Messiaen et repousse les frontières de la compréhension de la composition musicale. Au-delà des étapes du processus créateur, les emprunts dévoilent l'imaginaire du compositeur, mais aussi les relations multiples et complexes qui se nouent entre admiration et audace, entre modèle et invention.
Figure majeure de la création musicale au cours de la seconde moitié du xxe siècle, Toru Takemitsu (1930-1996) attachait aussi une grande importance à l'écriture qu'il a pratiquée tout au long de sa vie, passant du manifeste esthétique au récit littéraire, de l'analyse musicale au portrait, de l'aphorisme à l'essai développé.
Proche de personnalités telles qu'Isamu Noguchi, Akira Kurosawa, Jasper Johns ou Kenzaburo ?, Takemitsu ne se limite pas au cadre musical dans ses écrits?: on est frappé par la variété et la richesse des centres d'intérêt du compositeur, bien au-delà de la confrontation entre Orient et Occident à laquelle son nom a souvent été associé. Les textes de Takemitsu sont une traversée de la mémoire, des émotions, des mondes artistiques et musicaux. Son art de la métaphore, ancré dans la perception, réticent à la généralisation théorique, résonne aujourd'hui avec force. Ces écrits témoignent aussi bien de la vie créative du compositeur que d'une grande richesse culturelle et artistique du Japon de la seconde moitié du xxe siècle.
La sélection minutieuse des textes présentés, traduits et annotés dans cet ouvrage permettra au lectorat francophone de découvrir sous un nouveau jour l'univers esthétique d'un compositeur qui, bien que joué et célébré depuis longtemps en Occident, s'avère mal connu.
Ce manuel propose un panorama général de l'art du jeu en ensemble aux périodes baroque, classique et romantique. Les sujets relatifs aux effectifs, à la constitution des ensembles et à leur direction sont abordés, mais c'est surtout la question de la pratique des musiciens qui est ici centrale?: comment un musicien d'orchestre, entre le xviie et le xixe siècle, comprend-il les indications portées sur sa partie, et comment les exécute-t-il ??
De ce point de vue, ce livre peut se lire comme un cours fondamental sur la pratique d'exécution historique. Quinze études de cas, sur des partitions issues des trois périodes, permettent en outre d'appréhender les informations théoriques données à la lumière du répertoire de l'époque.
Ce manuel pratique s'adresse à tous ceux qui sont concernés par l'interprétation d'oeuvres orchestrales : étudiants, musiciens professionnels, chefs d'orchestre, mais aussi musicologues ou éditeurs, ainsi qu'aux profanes qui s'intéressent à ces sujets.
Dans Une chambre à soi, Virginia Woolf se demande ce qu'il serait advenu d'une hypothétique soeur de Shakespeare. La romancière se pose avec humour la question de la créativité féminine, question à laquelle certains osent répondre : « une femme ne saurait être géniale ». Fanny est née à Hambourg en 1805 et décédée à Berlin en 1847. Elle était de quatre ans l'aînée du compositeur Felix Mendelssohn Bartholdy. Les deux enfants apprirent la musique ensemble et leur entourage les considérait comme « également doués ». Fanny ne se déclara pourtant jamais ni compositrice, ni musicienne de profession : pour toute carrière, elle dut se contenter de sa maison et de sa famille. À la carrière publique de son frère correspondit une carrière privée de Fanny qui organisait dans son salon des concerts fabuleux avec les « moyens du bord », montrant ainsi ses qualités de pianiste, d'organisatrice, de chef d'orchestre et de chef de choeur, qualités qu elle possédait au même degré que Felix. Fanny osa franchir le pas du privé au public seulement vers l'âge de 40 ans en acceptant de faire éditer quelques cahiers de lieder et de mélodies pour le piano. L'oeuvre qu elle a laissée est personnelle et forte : elle composait vite et ses « esquisses » sont pleines de vie et d'imagination. C'est presque une gageure que d'envisager la biographie d'une seule ou d'un seul Mendelssohn. Non seulement le chercheur ou la chercheuse se passionne tour à tour pour chacun d'entre eux et ils représentent une assez vaste famille , mais eux-mêmes ne se pensaient pas les uns sans les autres. Pour parler de Fanny Hensel et la rendre vivante, le mieux est encore de parler des gens qu'elle aimait et de les situer dans leur contexte. Les Mendelssohn sont avant tout une famille et un clan. Fanny en devint peu à peu le coeur que sa mort fit éclater.
De la connaissance de la physiologie à l'analyse psychologique, du fonctionnement vocal à la perception acoustique, ce livre éclaire le sujet complexe de la voix chantée par une approche multi-disciplinaire.
Ce tableau brossé par des médecins, des chercheurs et des pédagogues - et enrichi par les exemples sonores et vidéos joints sur le cédérom - donne à penser à tous les pédagogues de la voix, et plus généralement à toute personne directement concernée par la voix chantée.
« Si vous mettez un violon dans les mains d'un enfant nécessiteux, dit José Antonio Abreu, il ne prendra pas une arme à feu. » Un enfant qui tient un instrument sent qu'on lui confie un objet de valeur. Un enfant à qui l'on apprend à jouer d'un instrument se sent compétent, utile et capable d'enseigner aux autres. Un enfant qui joue dans un orchestre composé d'amis a un sentiment d'appartenance à une communauté, dans laquelle respect mutuel et création de beauté sont inséparables.
Depuis 1975, le million d'enfants vénézuéliens formés par le Sistema donne raison à son fondateur, le musicien et économiste visionnaire José Antonio Abreu, récompensé en 1998 par l'UNESCO du titre d'ambassadeur pour la paix. Son programme d'éducation musicale propose gratuitement aux enfants l'apprentissage de la musique à des fins sociales. Un de ses plus célèbres élèves, Gustavo Dudamel, chef de l'orchestre philharmonique de Los Angeles, en a bénéficié depuis l'enfance et continue d'en faire la promotion dans le monde entier.
Tricia Tunstall nous fait découvrir le Sistema de l'intérieur, au cours de voyages et de rencontres au Venezuela, et nous éclaire sur les ressorts de ce mouvement?: l'enseignement par la pratique collective, l'abord des grandes oeuvres du répertoire, mais aussi la coopération, la transmission entre jeunes et l'émulation. Elle nous fait partager des moments de grâce lors des visites de núcleo, ces « centres » éducatifs qui se multiplient chaque année?: les enfants sont passionnés par la pratique musicale en groupe, les professeurs sont émerveillés par les progrès rapides de leurs élèves.
Un panorama des actions similaires développées sur le territoire français complète ce livre.
Agile, irisée, sinueuse, immense, sachant se faire impérieuse, poignante, enjôleuse, hilarante, la voix de contralto d'Ewa Podles' a fait irruption dans presque tous les répertoires : bel canto rossinien, musique baroque et contemporaine, mélodie russe, lied, symphonie romantique, opéra verdien ou straussien.
Admirée par ses pairs, ovationnée par le public tout au long de sa carrière, encensée par la critique, parfois contestée, voire dédaignée, Podles' a poursuivi son chemin avec une exigence artistique inébranlable qui a parfois pu aller jusqu'à l'intransigeance.
Intriguée par le pouvoir de fascination de l'artiste, l'auteur a voulu interroger son itinéraire. Les témoignages des proches et ce que la chanteuse raconte elle-même éclairent les circonstances de son enfance et de sa formation musicale. Les nombreux souvenirs confiés avec une franchise non dénuée d'humour, les conversations de l'auteur avec certains amis et collègues d'Ewa, les extraits d'articles et d'interviews font apparaître apparaître différents fils rouges, éphémères ou durables, qui créent autour de la contralto un réseau d'admirateurs passionnés et une aura particulière.
Après ses jeunes années, les débuts et l'essentiel de sa carrière en Pologne, ce livre retrace le parcours d'Ewa Podles' en Europe et en Amérique du Nord, avec ses rencontres, ses anecdotes, ses luttes, ses chances et ses malchances. À travers cette structure, l'auteur dresse un portrait plus kaléidoscopique que linéaire de l'artiste - chanteuse et femme hors du commun en quête d'authenticité et de la joie de chanter.
L'art musical est sans contredit celui de tous les arts qui fait naître les passions les plus étranges, les ambitions les plus saugrenues, je dirai même les monomanies les plus caractérisées. Parmi les malades enfermés dans les maisons de santé, ceux qui se croient Neptune ou Jupiter sont aisément reconnus pour monomanes ; mais il en est beaucoup d'autres, jouissant d'une entière liberté, dont les parents n'ont jamais songé à recourir pour eux aux soins de la science phrénologique, et dont la folie pourtant est évidente. La musique leur a détraqué le cerveau. Je m'abstiendrai de parler à ce sujet des hommes de lettres, qui écrivent, soit en vers, soit en prose, sur des questions de théorie musicale dont ils n'ont pas la connaissance la plus élémentaire, en employant des mots dont ils ne comprennent pas le sens ; qui se passionnent de sang-froid pour d'anciens maîtres dont ils n'ont jamais entendu une note ; qui leur attribuent généreusement des idées mélodiques et expressives que ces maîtres n'ont jamais eues, puisque la mélodie et l'expression n'existaient pas à l'époque où ils vécurent ; qui admirent en bloc, et avec la même effusion de coeur, deux morceaux signés du même nom, dont l'un est beau en effet, quand l'autre est absurde ; qui disent et écrivent enfin ces étonnantes bouffonneries que pas un musicien ne peut entendre citer sans rire. C'est convenu, chacun a le droit de parler et d'écrire sur la musique ; c'est un art banal et fait pour tout le monde ; la phrase est consacrée. Pourtant, entre nous, cet aphorisme pourrait bien être l'expression d'un préjugé. Si l'art musical est à la fois un art et une science ; si, pour le posséder à fond, il faut des études complexes et assez longues ; si, pour ressentir les émotions qu'il procure, il faut avoir l'esprit cultivé et le sens de l'ouïe exercé?; si, pour juger de la valeur des oeuvres musicales, il faut posséder en outre une mémoire meublée, afin de pouvoir établir des comparaisons, connaître enfin beaucoup de choses qu'on ignore nécessairement quand on ne les a pas apprises ; il est bien évident que les gens qui s'attribuent le droit de divaguer à propos de musique sans la savoir, et qui se garderaient pourtant d'émettre leur opinion sur l'architecture, sur la statuaire, ou tout autre art à eux étranger, sont dans le cas de monomanie. Ils se croient musiciens, comme les autres monomanes dont je parlais tout à l'heure se croient Neptune ou Jupiter. Il n'y a pas la moindre différence.
Quand Balzac écrivait son Gambara et tentait l'analyse technique du Moïse de Rossini, quand Gustave Planche osait imprimer son étrange critique de la Symphonie héroïque de Beethoven, ils étaient fous tous les deux. Seulement la folie de Balzac était touchante ; il admirait sans comprendre ni sentir, il se croyait enthousiasmé. L'insanité de Planche était irritante et sotte, au contraire ; sans comprendre, ni sentir, ni savoir, il dénigrait Beethoven et prétendait lui enseigner comment il faut faire une symphonie.
Je pourrais nommer une foule d'autres écrivains qui, pour le malheur de l'art et le tourment des artistes, publient leurs idées sur la musique, en prenant constamment, comme le singe de la fable, le Pirée pour un homme. Mais je veux me borner à citer divers exemples de monomanie inoffensive et par cela même essentiellement plaisante, que l'histoire moderne me fournit.
Chanter sur le Livre, à la Renaissance, c'est ajouter une ou plusieurs voix à une mélodie écrite, le cantus firmus. Autour de cette mélodie, qu'elle soit de plain-chant, de chanson, de psaume, etc., les chanteurs ou instrumentistes improvisent d'autres lignes, en créant le contrepoint sur le vif.?Du gymel (à 2 voix) en passant par le faux-bourdon (à 3 voix) et jusqu'aux contrepoints à 4 et 5 voix, ce manuel pratique explore méthodiquement les différentes techniques d'improvisation sur cantus firmus... ou sans cantus firmus, comme les canons à 2 et à 3 voix.
Pour chaque technique, des consignes précises illustrées d'exemples musicaux sont données pour improviser les différentes voix. Des conseils de travail et des exercices préparatoires viennent guider les apprentis dans leur progression.
Dans la deuxième partie de ce livre, un recueil de mélodies, tirées de la musique sacrée (antiennes, hymnes, psaumes) aussi bien que profane (chansons, carols, laudes) permettra à chacun de mettre en application les techniques d'improvisation proposées. Une large place est faite aux belles mélodies des chansonniers des XVe et XVIe siècles (Bayeux, Palacio, Chardavoine, Lochamer Liederbuch).
Cet ouvrage s'adresse à tous, musiciens amateurs, enseignants et professionnels, chanteurs aussi bien qu'instrumentistes. Chacun y glanera, au gré des différents chapitres, les conseils qui lui conviennent, selon ses aptitudes et ses envies. On pourra également se servir de ce livre comme outil d'initiation à l'arrangement et à l'écriture dans le style de la Renaissance.
Tout au long de sa carrière de virtuose et de compositeur, Franz Liszt a parcouru les routes de l'Europe. Jusqu'en 1847, il n'a cessé de conquérir les foules avec son piano, de Gibraltar à Saint-Pétersbourg, en passant par Glasgow et Istanbul. Encore aujourd'hui, le phénomène du "?roi des pianistes?" continue de fasciner. La France occupe une place particulière dans ces tournées exceptionnelles?: Liszt n'a jamais manqué de s'y faire entendre et de parcourir ses provinces à plusieurs reprises.
Le présent ouvrage offre, pour la première fois, un vaste aperçu de ses concerts en province française?: on découvre la vie musicale des villes de province où les personnalités marquantes jouent un rôle important dans l'organisation matérielle des concerts, des banquets et des soirées d'adieux.
Écrits par des spécialistes de Liszt et de la vie musicale française au XIXe siècle, les dix-huit essais rassemblés ici offrent au lecteur des informations souvent inédites. On pourra ainsi mesurer l'importance de Liszt pour le patrimoine musical français, et la place de la France au sein de la carrière du " roi des pianistes ".
« M. Onslow, on le sait, est une des plus belles gloires musicales de la France car, malgré son nom anglais, ce grand artiste est notre compatriote. [.] La beauté calme de plusieurs de ses adagios et la verve pétulante de la plupart de ses finales (presto) témoignent de la facilité avec laquelle il manie les styles les plus opposés ; on le compte en outre parmi les plus grands harmonistes de l'époque. » (Hector Berlioz).
Festina lente... jamais devise familiale n'a semblé plus appropriée à l'un de ses membres, George Onslow (1784-1853), dont on commence seulement à découvrir - 150 ans après sa mort - la véritable stature. Cet ouvrage, par la multiplicité des points de vue qu'il propose, éclaire d'un jour nouveau l'oeuvre du compositeur. Associant musicologie, analyse musicale et histoire de l'art, cet ouvrage présente de nouvelles perspectives historiques et biographiques liées à l'artiste, explore de manière détaillée le champ de sa musique instrumentale et consacre une dernière partie à la redécouverte de sa musique lyrique. Outre des textes de synthèse, des études de cas s'attachent à des oeuvres de nos jours totalement inconnues qu'elles remettent en lumière, comme la Toccata pour piano, les sonates pour piano à quatre mains, la cantate Caïn maudit ou encore l'opéra Guise ou les États de Blois...