Thierry Van Roy, coureur de fond de l'inutile, chien errant de la galaxie, passe-muraille du chaos est un réjoui de la dérive. Il ne sait jamais où il va, il ne va jamais où il sait. Un vent chargé de neige intérieure l'a poussé en Sibérie Noire, il n'en est jamais revenu. Ses restes sont arrivés par la poste, dans une enveloppe à papier-bulles : quelques textes de poésie intraveineuse, des photos très noires d'un pays blanc. Une liste de ses préférences : le son des bogies du Transsibérien, se faire lécher le visage par les aurores boréales, court-circuiter les constellations, craquer des allumettes aux esprits.
Dans «Sibérie Noire», son testament polygraphe commencé à la naissance, Thierry Van Roy lègue toutes sortes de choses qu'il n'a pas, à des gens qui n'existent pas.
Les beaux jours ont duré une saison. Un automne, en fait. Comme nous, les plantes changeaient de visage. Leurs couleurs s'empourprent, c'est la saison des passions, c'est certain. En automne, personne n'a encore conscience de l'hiver. C'est comme au coucher de soleil, on ne s'attend pas à la nuit.
On profite de l'illusion qu'une telle chose nous offre. Juste un instant.
[...] Nos rapports s'étaient complètement éteints. Parlez de pépin : nous venions d'emménager. Peut-être les murs ne sont-ils pas faits pour les hommes ?
Peut-être que si un homme commence à mettre paille sous un nid, un jour il y mettra flamme, comme par exprès ?
Puis les nuits se faisaient plus courtes, la passion est un somnifère imparable.
Le meilleur qui soit, à vrai dire.